Question :
Est-il permis à une personne de s’auto-proclamer juge des gens dans toutes les situations ?
Et, quand est-il religieusement toléré de dire : « Untel est mauvais, untel est comme ci, … » ?
Réponse :
Il ne sied pas à une personne de s’auto-proclamer juge, alors qu’elle s’oublie elle-même…
Il est plutôt de son devoir de chercher ses propres défauts d’abord, avant de regarder ceux des autres.
Par contre, si le musulman décide de conseiller ses frères, en ordonnant le bien, et en interdisant le mal, ceci est une bonne chose.
Dans ce cas, on ne dit pas : « Il s’est autoproclamé juge des gens. »
Allah le Très-Haut dit (traduction rapprochée) :
« Les croyants ne sont que des frères. Établissez la concorde entre vos frères » (1)
Et, le Prophète, prière et salut d’Allah sur lui, dit :
« Les croyants sont comparables à une construction dont les éléments se fortifient l’un l’autre. » (2)
Allah le Très-Haut dit aussi (traduction rapprochée) :
« Entraidez-vous dans l’accomplissement des bonnes œuvres et de la piété et ne vous entraidez pas dans le péché et la transgression. » (3)
Le Prophète, prière et salut d’Allah sur lui, a dit aussi :
« La religion, c’est le bon conseil. »
Les Compagnons demandèrent : « Envers qui, Ô Messager d’Allah ? » Il dit :
« Envers Allah, Son Livre, Son Messager, et envers les dirigeants des musulmans et la communauté en général. » (4)
Le Prophète, prière et salut d’Allah sur lui, dit encore :
« Aucun d’entre vous n’atteindra la foi parfaite jusqu’à ce qu’il aime pour son frère ce qu’il aime pour lui-même. » (5)
Il est donc nécessaire de s’améliorer soi-même dans un premier temps, puis d’essayer d’améliorer la condition des autres, par amour du bien pour eux et pour les conseiller.
Il ne faut pas que ce soit fait dans le but de rabaisser les autres ou pour dévoiler leurs défauts, car ça, l’islam l’interdit.
Il faut donc que ce soit fait par amour du bien pour autrui.
Quant au fait de dire : « Untel est mauvais et untel est comme ça … », ce n’est pas toléré religieusement pour le musulman de dire cela de son frère musulman, sauf dans le cas où il est connu pour sa déviation et ses mauvaises intentions.
Celui qui sait cela à son sujet doit dire ce qu’il sait de sa perversion et sa déviation, à condition qu’il y ait un intérêt religieux, comme le fait de mettre les gens en garde contre cette personne afin de repousser le danger qu’il représente.
Par contre, s’il dit cela dans le seul but de porter atteinte à son honneur ou de le critiquer, alors ce n’est pas permis, car cela correspondrait à une attaque personnelle dans laquelle il n’y a aucun bienfait.
De plus, il n’y a aucun doute que le fait de juger les gens nécessite retenue et vérification.
Il ne faut donc pas se baser sur sa propre opinion car Allah le Très-Haut dit (traduction rapprochée) :
« Ô vous qui avez cru ! Évitez de trop conjecturer [sur autrui] car la plus grande partie des conjectures est péché. Et, n’espionnez pas ; et ne médisez pas les uns des autres. » (6)
De même, il ne faut pas se baser sur l’information donnée par un pervers, car Allah le Très-Haut dit (traduction rapprochée) :
« Ô vous qui avez cru ! Si un pervers vous apporte une nouvelle, assurez-vous (de son authenticité) [de crainte] que par ignorance, vous ne portiez atteinte à des gens et que vous ne regrettiez par la suite ce que vous avez fait. » (7)
C’est pour cette raison qu’il faut s’éloigner des mauvais doutes et il ne convient donc pas de juger en ne se basant que sur ces doutes. Pareillement, il ne faut pas accepter d’informations de qui que ce soit sans contrôle, ni vérification.
On ne juge les gens qu’en se basant sur la science religieuse.
Ainsi, si l’on est doué de science religieuse, on juge en fonction de ce qui nous est apparu vrai.
Par contre, si l’on est ignorant des règles religieuses, il est interdit de juger les agissements des gens.
Il convient aussi de ne pas s’embourber dans les domaines à propos desquels on n’a aucune science (traduction rapprochée) :
« Et ne poursuis pas ce dont tu n’as aucune connaissance. L’ouïe, la vue et le cœur : sur tout cela, en vérité, on sera interrogé. » (8)
Allah le Très-Haut dit aussi (traduction rapprochée) :
« Dis : ‘Mon Seigneur n’a interdit que les turpitudes (les grands péchés), tant apparentes que secrètes, de même que le péché, l’agression sans droit, et d’associer à Allah ce dont Il n’a fait descendre aucune preuve, et de dire sur Allah ce que vous ne savez pas’. » (9)
En outre, celui qui n’a pas de science ne doit pas prononcer de jugements en se basant uniquement sur son opinion ou son avis, ou sur ce que lui dicte son ego (Nafs).
Il lui incombe plutôt de s’abstenir, car la situation présente un grand danger : quiconque accuse son frère d’une chose dont il est innocent, ou le décrit par une caractéristique qui ne correspond pas à la réalité, verra, en retour, ces choses s’appliquer à lui, comme cela a été rapporté dans le hadith :
« Si l’on maudit une personne qui ne mérite pas la malédiction, elle s’appliquera sur celui qui l’a prononcée. » (10)
De même, il n’est pas permis au musulman de dire à son frère : « Ô pervers ! Ô mécréant ! » ou « Ô mauvais ! »… et tout ce qui correspond à ce genre de mauvais qualificatifs.
Allah le Très-Haut dit (traduction rapprochée) :
« Et ne vous lancez pas mutuellement des sobriquets (injurieux). Quel vilain mot que ‘perversion’ lorsqu’on a déjà la foi. » (11)
Il est donc du devoir du musulman de se préserver de ce genre de situations.
Il faut qu’il soit doué de la science et de la clairvoyance qui lui permettront de juger sa propre âme avant tout, puis de juger les autres, dans un second temps.
Enfin, il est nécessaire qu’il soit posé, réfléchi, fasse preuve de retenue et qu’il ne se précipite pas dans les choses.
(1) Les Appartements, v. 10.
(2) Rapporté par Al-Bukhârî, chapitre des injustices (2446) et Muslim chapitre du bon comportement (2585).
(3) La Table Servie, v. 2.
(4) Rapporté par Muslim, chapitre de la foi (55).
(5) Rapporté par Al-Bukhârî, chapitre de la foi (13) et Muslim, chapitre de la foi (45).
(6) Les Appartements, v. 12.
(7) Les Appartements, v. 6.
(8) Le Voyage Nocturne, v. 36.
(9) Al A’râf, v. 33.
(10) Rapporté par Abû Dâwûd chapitre des bonnes manières (4908) ; At-Tirmidhî, chapitre du bon comportement (1978) d’après Ibn ‘Abbâs ; Abû Dâwûd (4905) d’après Abû ad-Dardâ.
(11) Les Appartements, v. 11.
Kitâb ud-Da’wa, n°7, vol. 2, pages 168 et 170.
✅ Publié par fatawaislam.com
Cheikh Salih Bin Fawzan Bin ‘Abdillah Al Fawzan – الشيخ صالح بن فوزان الفوزان