Il va de soi que l’ignorant ne peut en aucun cas prêcher, car Allah a dit dans le verset cité ci dessus (traduction rapprochée) :
« Dis : ceci est ma voie, j’appelle (les gens à la religion) d’Allah avec clairvoyance… ».
Dans ce verset le mot “basîrah” traduit par “clairvoyance” désigne la science, la connaissance, le savoir. Ainsi, la possession de ce savoir est indispensable car celui qui prêche va être inévitablement amené à débattre avec des savants égarés qui vont tenter de le troubler par le moyen du faux ( arguments futiles ) et du doute, et ceci afin de repousser la vérité.
Allah a cite dans son livre saint (traduction rapprochée) :
« Et débat avec eux de la meilleure façon » [les abeilles – V 125]
Le Prophète, que la paix et la bénédictions d’Allah soit sur lui, a dit à Mou’adh (4) (qu’Allah soit satisfait de lui):
« Tu vas certes rencontrer un peuple qui appartient aux gens du livre (5)(…) »
Ceci nous démontre que si le da’i (celui qui fait da’wa) ne possède pas suffisamment de connaissances pour faire face à chaque doute et réfuter toutes les oppositions, alors il sera battu à la première rencontre et sera stoppé au début de son chemin.
Le comportement (pratiquer soi-même ce vers quoi on appelle)
Le da’i doit être un exemple parfait, c’est à dire que ses paroles doivent être en accord avec ses actes. Dans le cas contraire, ses actes deviendront des preuves contre lui même.
Allah commanda à son Prophète Chu’ayb, paix sur lui, de dire à son peuple (traduction rapprochée) :
«(…) Je ne veux nullement faire ce que je vous interdis. Je ne veux que la reforme autant que je le puis (…) » [ S Houd V 88]
Et Allah a dit à son envoyé Mohammed ( paix et bénédictions d’Allah sur lui) (traduction rapprochée) :
« Dis: en vérité, ma prière et mon adoration, ma vie et ma mort appartiennent à Allah Seigneur des mondes. A Lui nul associé ! Et c’est cela qui m’a été prescrit et je suis le premier à me soumettre » [ S les bestiaux – V 162,163 ]
« (…) Et qui profère plus belles paroles que celui qui appelle (les gens) vers Allah et fait bonne œuvre (…) » [ les versets détaillés V 33 ]
La pureté de l’intention (ikhlâss) (6)
Cette mission doit être effectuée uniquement en vue de l’agrément d’Allah.
L’ostentation, la recherche de la notoriété et le souhait de gravir les échelons de la classe sociale, de s’emparer du commandement et tout ce qui fait partie des convoitises de cette vie d’ici-bas ne peuvent et ne doivent être l’objectif du prêcheur.
Car si une de ces ambitions venait à se concrétiser, alors cet appel serait accompli sans sincérité et deviendrait un moyen d’assouvissement de ses propres désirs.
Allah, pureté à lui, nous a informe que ses prophètes disaient à leurs communautés (traduction rapprochée) :
« Je ne vous demande pour cela aucune récompense »
Les étapes (commencer par le plus important)
Le da’i doit débuter par la réforme de la croyance et ceci en recommandant d’adorer Allah avec sincérité et en interdisant l’association ( Chirk ).
Dans un second temps, il exhorte les gens à l’accomplissement de la prière, au versement de l’impôt rituel (zakât), au respect des obligations religieuses et à l’abandon des interdictions.
Ce chemin n’est autre que celui emprunté par l’ensemble des prophètes comme Allah a dit: (traduction rapprochée)
« Nous avons envoyé dans chaque communauté un messager, (pour leur dire) : Adorez Allah et écartez-vous du taghut (7) (…) » [S les abeilles – V 36]
« Et Nous n’avons envoyé avant toi aucun messager à qui nous n’ayons révélé : “Point de divinité en dehors de Moi. Adorez-Moi donc” » [ Les prophètes – V 25].
Et lorsque le Prophète, paix et bénédictions d’Allah sur lui, envoya Mou’adh au Yémen, il lui dit :
“Tu vas certes rencontrer un peuple qui appartient aux Gens du Livre. Commence donc par leur prêcher le témoignage de la foi: ” il n’y a pas d’autre dieu qu’Allah et je suis l’envoyé d’Allah “. S’ils acceptent, alors enseigne leur qu’Allah a imposé cinq prières à accomplir de jour comme de nuit. S’ils acceptent, alors enseigne leur qu’Allah a légiféré le versement de l’impôt rituel (Zakat) qui doit être pris des gens riches pour être donné aux pauvres de leur communauté”.
On remarque également que dans sa vie et son parcours, le Prophète, paix et bénédictions d’Allah sur lui, fut le meilleur exemple, et a accompli sa mission de la meilleure manière, en restant à la Mecque durant treize années pendant lesquelles il appela les gens à l’unicité d’Allah et à l’abandon de l’association avant de leur ordonner la prière, le versement de la Zakat, le jeûne et l’accomplissement du pèlerinage et surtout, avant de leur interdire l’usure (riba), la fornication ( zina ), le vol et le meurtre.
La patience, l’endurance et la persévérance (8)
Le da’i va être inévitablement confronté à des adversités, car il faut prendre conscience que ce n’est pas un chemin tranquille qu’il va emprunter, mais bien plutôt un chemin semé d’embûches, de dangers, de souffrances et d’incertitudes.
Observons ainsi les meilleurs exemples, c’est-à-dire les Prophètes ( paix et bénédictions d’Allah sur eux ) :ils ont dû faire face au moqueries et aux préjudices de leurs peuples, comme il est relaté dans le Coran (traduction rapprochée) :
« On s’est moqué de messagers venus avant toi. Et ceux qui se sont moqués d’eux, se virent frapper de toutes parts par l’objet même de leurs moqueries » [ Les prophètes – V 41 ]
« Certes, des messagers avant toi (Muhammad) ont été traités de menteurs; Ils endurèrent alors avec constance d’être traités de menteurs et d’être persécutés, jusqu’à ce que Notre secours leur vint (…) » [ Les bestiaux – V 34]
Ceux qui suivent les prophètes, seront donc confrontés aux mêmes difficultés et épreuves. Ces difficultés seront proportionels aux efforts déployés dans la da’wa (9).
La sagesse (10)
Afin de transmettre le message de la meilleure façon, le da’i devra avoir un caractère vertueux et faire preuve de sagesse. Allah, le Très Haut, commanda à Moussa et Haroun, que la paix et le salut soit sur eux, d’avoir ces mêmes qualités pour faire face au plus mécréant des hommes, à savoir : Pharaon, qui prétendit être le seigneur des hommes.
Allah, pureté à Lui, dit (traduction rapprochée) :
« Puis, dites-lui une parole douce, peut être se rappellera-t-il ou (Me) craindra-t-il » [Ta Ha – V 44 ]
Puis Allah dit à Moussa, paix et salut sur lui (traduction rapprochée) :
« Vas vers pharaon, vraiment, il s’est rebellé ! Puis dis-lui: ” Voudrais tu te purifier ? Et que Je te dirige vers ton Seigneur afin que tu Le craignes ? » [ s 79 – V 17, 18,19]
« C’est certes par quelque miséricorde de la part d’Allah que tu as été si doux envers eux. Mais si tu étais rude, au cœur dur, ils se seraient enfuis de ton entourage. » [La famille d’Imrane- V 159]
« Par la sagesse et la bonne exhortation appelle ( les gens ) au sentier de ton Seigneur (…) » [ les abeilles – V125]
« Et tu es certes d’une moralité éminente » [ La plume – V 41]
L’espérance et la confiance
Le da’i ne doit pas désespérer du résultat de sa da’wa ou de la guidée de sa communauté, de la même façon qu’il ne doit pas désespérer de l’aide d’Allah, pureté à Lui, et ce, même s’il s’écoule un temps considérable sans qu’il n’y ait de résultat apparent. Encore une fois, le meilleur des exemples dans ce cas est celui des envoyés, paix et salut sur eux.
Noé, paix sur lui, demeura 950 ans au milieu de son peuple pour leur prêcher l’unicité d’Allah, pureté à lui.
Notre Prophète Mohammed, paix et bénédictions d’Allah sur lui, lorsque les préjudices des mécréants se multiplièrent, l’ange des montagnes vint à lui , pour lui demander la permission de les écraser en rabattant les flancs de la montagne sur eux, Mohammed, paix et bénédictions d’Allah sur lui, lui répondit :
« Non, mieux vaut leur accorder un délai, peut être qu’Allah désignera parmi leur descendance des hommes qui l’adoreront sans rien lui associer ».
Cette da’wa nécessite donc de posséder ces qualités que sont la confiance et l’espérance, dans le cas contraire, la déception et l’impatience seront la cause de l’abandon de cette da’wa.
Tous les points précédemment développés, qui définissent la méthode employée par les envoyés dans leur da’wa, devront obligatoirement constituer la base même de ce travail. Et si négligence il y a ( dans l’application de ces points ), alors l’échec sera le seul résultat de ces vains efforts.
La preuve la plus évidente à ce sujet est celle des différents groupes musulmans d’aujourd’hui qui ont établi leur méthodologie et leur programme d’une façon divergente de la méthodologie des prophètes.
Ces groupes ont négligé l’importance de la croyance authentique, appellent à des points de “seconde importance” et ont commencé à prêcher la reforme de questions latérales: Parmi ces différents groupes, il y a ceux qui prêchent la reforme des lois (gouvernementales) et de la politique, et réclame l’application des peines du code pénal islamique, ainsi que l’observance de la chari’a ( la loi musulmane ) dans la société.
Ceci, nul doute, est un pôle essentiel, seulement ce n’est pas le plus important: – Comment peut-on exiger l’application de la Shari’a sur le voleur et le fornicateur avant même de l’exiger sur l’associateur ( celui qui donne des associés à Allah, pureté à Lui ) ?
Comment peut-on revendiquer l’application de la Shari’a sur deux personnes qui se disputent à cause d’un litige portant sur des moutons, avant de revendiquer l’application de la Shari’a sur les adorateurs d’idoles et des tombes, et ceux qui nient les Noms et les Attributs d’Allah ou qui déforment leurs sens et significations ?
Est ce que ces derniers ne commettent-ils pas un crime plus grave que ceux qui boivent de l’alcool ou qui volent ?
Ce sont certes des infractions dans le droit des humains, mais le Chirk et le fait de nier les attributs d’Allah sont des infractions (blasphèmes) dans le droit du créateur, Pureté à Lui.
Et chaque musulman se doit de connaître cette règle fondamentale :
(1) L’unicité (Tawhid) est le noyau de l’Islam, elle se divise en trois parties: L’unicité d’Allah dans Ses actions (création, gérance etc.). L’unicité d’Allah dans l’adoration (Allah seul mérite d’être adoré). L’unicité d’Allah dans Ses Noms et Attributs.
(2) Da’wa : ce mot exprime l’action de prêcher la religion et d’appeler les gens à se conformer à ses lois.
(3) ‘Ilm: ce terme qui a pour signification la science en général, désigne ici la connaissance du Coran et de son interprétation, du hadith, du Fiqh et de ses bases , de la croyance etc…
(4) Hadith rapporté par Boukhari et Mouslim. Lorsque le Prophète صلى الله عليه وسلم envoya Mou’adh Ibn Djabal au Yémen pour prêcher l’Islam, il lui dicta quelques conseils (cf le hadith ) et ce en l’an 10 de l’hégire.
(5) Ce hadith est également une preuve de la nécessité de connaître la société dans laquelle on va prêcher.
(6) Ikhlass : ce terme désigne la pureté et la sincérité de l’intention ( dans la volonté d’accomplissement d’un acte). L’essence de cette intention est la recherche de la satisfaction d’Allah, Seigneur des mondes, rien d’autres. L’ikhlass est l’une des conditions de l’acceptation de l’acte.
(7) Taghut: désigne tout diable, idole et toutes fausses divinités.
(8) En langue arabe, ces trois termes sont exprimés par un seul mot: SABR.
(9) Et ceci conformément au hadith : ” Mous’ab ibn Sa’d dit de son père qu’il demanda au Prophète ( pbsl ): quels sont les hommes les plus éprouvés? le Prophète صلى الله عليه وسلم , lui répondit : « Les plus éprouvés des gens sont les prophètes, puis ceux qui les suivent de la meilleure manière. L’homme est éprouvé suivant la qualité de sa pratique religieuse, si sa pratique est forte, alors il sera durement éprouvé; Si sa pratique est légère, alors il sera éprouvé en fonction de cette même pratique. Le serviteur d’Allah) ne cesse d’être éprouvé jusqu’à ce qu’on le laisse marcher sur la terre sans qu’il n’y rencontre un danger. » ( Voir la Silsila Sahihah ( cheikh Albani ) tome 1 hadith 144)
(10) Hikma: ce terme traduit par sagesse, est l’action de placer chaque chose en son lieu adéquat. Par exemple savoir distinguer les situations qui nécessitent la douceur de celles qui nécessitent la dureté.
(11) Tome 1, page 466
(12) Salaf-us-Salih, qui est traduit par pieux prédécesseurs ou ancêtres, sont les hommes désignés par le Prophète صلى الله عليه وسلم comme étant les meilleurs hommes de notre communauté : « Les meilleurs hommes sont ceux de mon siècle, puis ceux du siècle suivant, puis ceux du siècle suivant »(Voir Sahih Boukhari, chapitre ” tafsir du verset (traduction rapprochée) : « vous êtes la meilleure communauté (…) » [v 3, s 110]”, Al- Hakim dans “Al Mustadrak”(tome 4, p 74), Tafsir Ibn Kathir (tome 1, p 392).
Introduction rédigée par Cheikh El Fawzane (membre du conseil des Grands Savants d’Arabie Saoudite), pour l’ouvrage du Cheikh Rabi’ Ibn Haadi El Madkhali (Ancien président du département de la Sunnah de l’Université Islamique de Médine), intitulé : “La méthodologie des prophètes dans l’invitation (des gens) vers Allah”.
✅ Publié par salafi.chez.com
Cheikh Salih Bin Fawzan Bin ‘Abdillah Al Fawzan – الشيخ صالح بن فوزان الفوزان