Question :
Ceux qui mémorisent le Coran chez nous au Maroc le récitent apparemment à but lucratif.
Chaque fois qu’un banquet est donné en leur honneur, ils viennent réciter négligemment et insolemment le Coran sans le psalmodier.
Lors de telles réunions, alors que l’un récite le Coran, vous voyez les auditeurs inattentifs : l’un murmure à l’oreille de son voisin ou ils discutent ensemble des affaires temporelles.
Il y a également une certaine façon de récitation coranique qu’ils appellent “Takhazânt” chez nous : elle consiste à déformer la prononciation des termes coraniques, ce qui entraîne une migraine insupportable, notamment quand ils essayent de s’arrêter à une pause ou autre.
Vraisemblablement, ils ont mémorisé le Coran; mais, malheureusement, ils ne le comprennent pas et sont complètement incapables de vous guider d’aucune façon, parce qu’ils croient qu’il suffit de le mémoriser.
Dès qu’ils arrivent à de tels banquets, ils cherchent à toucher leurs salaires et à collecter les aumônes des gens en échange de la bénédiction !
Puis, ils se mettent à invoquer Allah en faveur des personnes charitables et de leurs défunts parents et à implorer Allah d’octroyer le succès et l’aide à ceux-là, etc.
Ayant terminés la collecte des aumônes, ils les partagent entre eux sans rien donner ni aux pauvres ni aux indigents.
Quel est le jugement de la charia islamique sur les aumônes qu’ils collectent et qu’ils partagent entre eux et sur la façon de la récitation du Coran qu’ils utilisent ?
J’ai, en fait, tombé dans un livre sur un hadith de l’Envoyé d’Allah (paix et bénédiction d’Allah sur lui), disant que:
“Quiconque récite le Coran à but lucratif, viendra au Jour de la Résurrection avec un visage décharné”.
Est-ce que ce hadith est authentique ou non?
Et quel est le sens de ce saint verset (traduction rapprochée) :
“Dis: “Pour cela, je ne vous demande aucun salaire… “ .
Réponse :
Que la louange soit exclusivement à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur l’Envoyé d’Allah, sur sa famille et sur ses compagnons…, et ensuite:
– Premièrement : La récitation du Coran est une pure pratique cultuelle et un moyen de s’approcher du Seigneur.
Comme toute autre pratique cultuelle, elle doit être observée par le musulman pour satisfaire Allah et rechercher la récompense auprès de Lui, sans chercher en aucune façon à plaire ou à être récompensé par quelqu’un d’autre que le Seigneur.
C’est pourquoi, il n’est point établi que les pieux prédécesseurs avaient loué des gens pour réciter le Coran au cours des festins ou des banquets ou que les calés en religion avaient autorisé ou permis un tel fait.
Il n’est pas établi non plus que l’un d’eux avait touché un salaire pour avoir récité du Coran ni durant les fêtes ou les funérailles.
Ils ne récitaient le Livre d’Allah qu’en vue d’acquérir Sa récompense, qu’Il soit Exalté.
Le Prophète (paix et bénédiction d’Allah sur lui) a, en outre, ordonné à celui qui récite le Coran de chercher exclusivement la récompense d’Allah et l’a mis en garde contre le fait de chercher le salaire auprès des gens.
At-Tirmidhî a rapporté dans ses Sunan d’après `Imrân ibn Husayn qu’il avait passé par un narrateur qui mendia en récitant le Coran.
Il lui a dit alors: Nous appartenons à Allah et nous Lui retournerons.
J’ai entendu l’Envoyé d’Allah (paix et bénédiction d’Allah sur lui) dire:
“Que celui qui récite le Coran, ne cherche que la récompense d’Allah exclusivement. (Dans les générations à venir), il y aura des gens qui cherchent la récompense des gens en récitant le Coran”.
At-Tirmidhî dans La Récompense du Coran (2918).
Quant au salaire reçu en échange de l’enseignement du Coran ou de l’exorcisme à l’aide du Coran, et des autres pratiques qui procurent du profit à autrui et non pas seulement à celui qui récite le Coran, il est des hadiths authentiques qui prouvent que de telles pratiques sont permises, comme le hadith rapporté d’après ‘Abû Sa`îd qui a reçu un troupeau de moutons comme paye après la guérison d’un malade qu’il avait exorcisé à l’aide de la sourate Al-Fâtiha.
Sa référence est déjà mentionnée.
Ainsi que le hadith de Sahl, quand le Prophète (paix et bénédiction d’Allah sur lui) a marié une femme à un homme en échange de la lui apprendre ce qu’il connaît du Coran.
Al-Bukhârî dans Les mérites du Coran (5029).
Donc, quiconque touche une paye en échange de la récitation du Coran ou quiconque loue un groupe de gens pour réciter le Coran, pèche contre ce sur quoi les pieux prédécesseurs (qu’Allah soit satisfait d’eux) se sont mis d’accord.
– Deuxièmement : Le Coran est l’ensemble des paroles d’Allah, l’Exalté et leur mérite sur les paroles des créatures est tel le mérite d’Allah sur Ses serviteurs.
Il comporte les meilleures invocations.
Celui qui le récite doit donc se comporter décemment, être recueilli et dirigé sincèrement vers Allah.
Il doit également savoir parfaitement le réciter, méditer sur ses sens autant qu’il le peut, se concentrer durant la récitation sans ni prétention ni extravagance et sans hausser la voix sans raison.
Ceux qui assistent à une séance où le Coran est récité doivent : prêter attentivement l’oreille à la récitation et méditer sur les sens coraniques.
Ils ne doivent pas dire des futilités ni se préoccuper de quelque chose autre que le Coran, comme le fait de murmurer avec les autres.
Ils ne doivent pas déranger ni celui qui récite ni les autres auditeurs: Allah, l’Exalté, dit (traductions rapprochées) :
“Et récite le Coran, lentement et clairement”. [Al-Muzamil: 4]
“Et invoque ton Seigneur en toi-même, en humilité et crainte, à mi-voix, le matin et le soir, et ne sois pas du nombre des insouciants”. [Al-‘A`râf: 205] .
– Troisièmement : Les gens sont différents, ils n’ont pas toutes les mêmes idées et ne sont pas au même degré d’intelligence.
Tout musulman adulte et sain d’esprit doit connaître sa religion et les jugements de la charia selon son aptitude à comprendre octroyée par Allah et le temps dont il dispose, pour mettre ses enseignements en pratique et diriger autrui vers la bonne voie.
La première des choses qu’il doit comprendre et s’en préoccuper en toute sincérité est le Livre d’Allah, l’Exalté.
Quand il se trouve incapable de comprendre certaines parties, qu’il se dirige vers Allah pour trouver des éclaircissements, puis vers les ulémas autant qu’il lui est possible.
Ensuite, il sera déchargé de toute responsabilité, car Allah, l’Exalté, n’impose à aucune âme une charge supérieure à sa capacité.
S’il n’arrive pas à comprendre le sens du Coran, il ne doit pas cependant éviter de le réciter, après avoir déployé tout effort possible, conformément à ce qui est établi d’après le Prophète (paix et bénédiction d’Allah sur lui) :
“Celui qui récite le Coran habilement sera avec les (anges) scribes, nobles et pieux. Et celui qui récite le Coran avec difficulté, et qui trouve pénible sa lecture, aura double récompense”.
Sa référence est déjà mentionnée.
– Quatrièmement : Il est permis au pauvre de percevoir de l’aumône ce qui satisfait à son besoin ainsi qu’aux besoins de ceux qui sont à sa charge.
Il lui est permis également d’invoquer Allah en faveur de celui qui lui a fait la charité.
Quant au fait de recevoir une paye en échange de la récitation du Coran ou d’une exhortation ou de donner de l’argent à quelqu’un en vue d’acquérir sa bénédiction, ou du fait de réunir des personnes en vue d’avoir leurs bénédictions ou leurs invocations, tout ceci n’est point permis.
De tels faits n’étaient pas pratiqués par les musulmans des trois générations jugées être les meilleures par le Prophète (paix et bénédiction d’Allah sur lui).
– Cinquièmement : Le sens de ce verset coranique (traduction rapprochée) :
“Dis: “Pour cela, je ne vous demande aucun salaire… “. [Sad: 86] est qu’Allah, l’Exalté, a ordonné à Son prophète Muhammad ((paix et bénédiction d’Allah sur lui) d’informer sa communauté qu’il ne leur demande aucune paye en échange de leur transmettre le Message qui lui est parvenu de Son seigneur et de les convoquer au monothéisme pur et à l’observance des divers préceptes de l’islam.
Sa prédication n’est que pour exécuter l’ordre d’Allah, pour Lui obéir en toute exclusivité et en vue d’acquérir la récompense et la rétribution de Lui.
Ce verset vise également à dissiper les faux doutes et soupçons des polythéistes prétendant que le Prophète (paix et bénédiction d’Allah sur lui) leur a invité à suivre le Message qui lui est transmis de la part d’Allah en vue d’un but lucratif ou pour être à la tête de sa communauté.
Il leur montre par-là qu’il ne les convoque à suivre le droit chemin que par pure obéissance à Allah, l’Exalté.
Tous les prophètes (qu’Allah soit satisfait d’eux) sont pareils sur ce point. Ils ne demandent aux gens aucun salaire en échange du Message qu’ils transmettent et, à ce propos, le hadith de `Imrân ibn Husayn mettant en garde contre la récitation du Coran à but lucratif et la mendicité à l’aide du Coran, est déjà mentionné.
Quant à la partie de votre question portant sur le châtiment de cet acte abominable au Jour de la Résurrection à propos du “visage décharné”; telle est une menace adressée à quiconque demande l’aumône aux gens sans en avoir vraiment besoin, soit en récitant le Coran ou pas.
D’après Ibn `Umar (qu’Allah soit satisfait de lui), le Prophète (paix et bénédiction d’Allah sur lui) a dit:
“Celui qui ne cesse de mendier comparaîtra devant Allah, le Très-Haut, (le Jour de la Résurrection), avec un visage complètement décharné”.
Al-Bukhârî dans La Zakâ (1474) et Muslim dans la Zakâ (1040).
D’après une autre version, l’Envoyé d’Allah (pbAsl) a dit:
“Le mendiant ne cesse de quémander des gens, jusqu’à l’arrivée du Jour de la Résurrection où son visage sera complètement décharné”.
(Transmis par Al-Bukhârî et Muslim)
D’après ‘Abû Hurayra (qu’Allah soit satisfait de lui), l’Envoyé d’Allah (paix et bénédiction d’Allah sur lui) a dit:
“Celui qui mendie en vue d’accroître ses richesses, ne fait que s’attirer de la braise, qu’il en cherche à acquérir peu ou beaucoup”.
Muslim dans la Zakâ (1041). (Transmis par Muslim)
Quiconque, étant pauvre, demande l’aumône aux gens en échange de la récitation du Coran, aura le châtiment mentionné dans le hadith cité précédemment au premier paragraphe de la réponse.
Quiconque, n’étant pas dans le besoin, demande l’aumône aux gens, sera châtié de la façon mentionnée dans tous ces hadiths déjà cités.
Quant aux termes du hadith que vous avez cité dans votre question, nous ne sommes pas sûrs de l’authenticité de son énonciation avec ces termes.
Et c’est Allah qui accorde la réussite.
Que la paix et la bénédiction d’Allah soient sur notre Prophète Muhammad, ainsi que sur sa famille et ses compagnons.
✅ Publié par qurancomplex.org
Comité permanent [des savants] de l’Ifta – اللجنة الدائمة للبحوث العلمية والإفتاء